Vendéen mon Fils

Vendéen mon Fils
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Avant Propos et message de bienvenue ...

La politique en son sens le plus large, celui de civilité ou Politikos, indique le cadre général d'une société organisée et développée … au sens de Politeia, elle renvoie à la constitution et concerne donc la structure et le fonctionnement (méthodique, théorique et pratique) d'une communauté, d'une société, d'un groupe social … au sens de Politikè, ou d'art politique cela la fait se référer à la pratique du pouvoir, soit donc aux luttes de pouvoir et de représentativité entre des hommes et femmes de pouvoir … Bonjour (ou bonsoir, selon l’heure à laquelle vous arrivez chez nous), vous êtes bienvenu(e). Nous pensons – à priori – que la société, la vie en société, la place de l'homme dans la société, la politique, vous intéressent … et que, c’est pour cela que vous êtes venu(e). Avant de commencer, il vous faut connaître les principes fondateurs et savoir l'indispensable afin de se familiariser avec les règles du projet : référencement au Droit naturel, à la Doctrine sociale de l'Eglise et au Magistère de l'Eglise ... et respecter les droits d'auteurs. Vous pourrez commenter chaque article et apporter des compléments. Nous souhaitons cependant que quatre principes soient honorés : respect, passion, innovation et rigueur. Toutes celles et tous ceux qui souhaitent s'investir et se former sont chez eux dans cette Agora ! Toutes discussions sont accueillies pour autant qu’elles soient dignes et respectueuses ; elles doivent être signées. Nous vous remercions pour votre présence, votre lecture et votre contribution. p. s. - L'académie d'études civiques est sur facebook … AFIN QUE TOUTES ET TOUS CONNAISSENT NOS REFERENCEMENTS, NOUS LES PRIONS DE SE RENDRE SUR : http://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_councils/justpeace/documents/rc_pc_justpeace_doc_20060526_compendio-dott-soc_fr.html O Père, ô mon Dieu, délivrez, sauvez maintenant votre France. Préparez le cœur de vos enfants à la mission qu'ils vont avoir à accomplir pour toutes les nations, pour l'Eglise tout entière. O Père, ô mon Dieu, que les cœurs de vos élus tressaillent maintenant à votre appel, reconnaissant Votre voix, Votre commandement, Votre invitation à agir. Conduisez-les, ô mon Dieu, chacun à sa place et chacun à sa mission. Imposez-leur Vous-même tout ce que Vous voudrez de chacun d'eux et de tous. Que rien ne soit l'effet de leur propre choix mais uniquement de Votre unique volonté d'amour. Vierge immaculée, ne les laissez pas s'égarer ni se tromper. Gloire au Père, au Fils et au Saint-Esprit. Cœur immaculé de Marie, priez pour nous. Saints et saintes de France, intercédez pour nous. Ceci est la prière que Marthe Robin, mystique catholique française et fondatrice des Foyers de Charité, née le 13 mars 1902 à Chateauneuf-de-Galaure et y décédée le 6 février 1981, aimait à adresser à Dieu. Nous avons pensé bon de la faire figurer ici pour que chacun puisse à son tour la présenter à Dieu Père, Fils et Esprit Saint par l'intercession de Notre Mère la Très Sainte Vierge Marie.

samedi 23 avril 2011

Promouvoir une élite chrétienne

« Pardonnez-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ! » C’est bien cette prière du Christ en Croix qui nous vient à l’esprit chaque jour en suivant l’actualité. Euthanasie, avortement, eugénisme, affaiblissement de la famille, théorie du genre, profanations et vexations aussi perverses qu’imaginatives…. C’est bien le drame du monde actuel ! Ils ne savent pas ce qu’ils font ! Les consciences ont été anesthésiées progressivement et savamment depuis une centaine d’année. Et les fruits portent. L’immense majorité des jeunes et des moins jeunes du reste, n’a aucune base culturelle. Les fameuses humanités qui formaient les esprits ne sont plus même une vague impression dans des mémoires assaillies par la pornographie, abêties par les émissions de télévisions vide de sens. Visiter et comprendre les jardins de Versailles est désormais hermétique à l’intelligence classique des jeunes générations. Victor Hugo, Eugénie ou Gabriel Marcel, ne sont plus que des noms de rue ou de station de métro. Tout ce sur quoi la pensée doit compter pour se forger a été peu à peu banni des programmes scolaires, des salles de spectacles, des films cultes. Alors que l’on vante la libération des hommes grâce au progrès des sciences et de la scolarisation, il faudrait peut-être humblement faire amende honorable et reconnaître l’immense régression intellectuelle, non seulement de l’élite, mais aussi des masses. Les laconiques et approximatives définitions de Wikipédia ne remplaceront jamais un cours sur l’histoire de France ou une pièce de Racine. ‘Mon Peuple périt faute de connaissance’ dit Dieu au prophète Osée. Voilà bien là le drame de l’humanité aujourd’hui. Hommes et femmes ne s’élèvent guère au-delà de l’animal évolué. Mais comme le constate Aristote dans son Ethique à Nicomaque, bien des bêtes nous sont supérieures dans l’ordre physique. Il n’est que l’intelligence qui puisse distinguer l’homme de la bête. Qu’avons-nous fait de notre intelligence ? Comment en être arrivé à tenir dans une même phrase, une chose et son contraire ? Tout simplement parce que la connaissance étant le plaisir de l’âme, un homme frustré cherche ses compensations dans les plaisirs du corps, c’est-à-dire, ces plaisirs qui lui sont communs aux animaux. Le pain et les jeux ! Nous y sommes bien revenus, il n’y a pas de doute.
Mais pourquoi ? Y a-t-il un complot ? Qu’une dynamique anti-chrétienne se soit développée c’est une évidence. Et le démon n’y est certainement pas étranger. Mais cette dynamique se nourrit également de la passivité des hommes face à leur destin et du système actuel. Sans être intentionnellement contre l’homme ou contre le Christ, une économie qui repose sur la consommation a tout intérêt à ce que la personne humaine soit sans repère et insatisfaite. Car cette perte d’identité est la source des besoins compensatoires qui constituent le fond de roulement de la société de consommation. Aussi face à ce double mouvement (besoin compensatoire et démission de l’intelligence), les repères ne tiennent plus et le relativisme devient l’échappatoire illusoire d’une société qui étouffe. De là, nombre de maux importants et structurels. Le système financier vicié qui vit sur cette fuite compensatoire. Le gender qui exacerbe l’égo et alimente cette perte d’identité mortifère. Le rapport à la vie déconnecté de l’homme lui-même.
Face à cela que faire ? Que peuvent faire les chrétiens isolés, désormais réduits à une minorité ridiculisée ? Benoît XVI n’aurait-il pas voulu nous donner une piste importante d’action avec cette initiative plus ou moins bien relayée du parvis des gentils ? Comme le remarquait saint Vincent de Paul au sujet des pauvres qui l’entouraient « avant de s’occuper de leur âme, il faut qu’ils prennent conscience qu’ils ont en une. » Voilà peut-être ce qui nous incombe à tous prioritairement !
Reformer une élite chrétienne capable d’être cette lumière du monde, reconquérir la culture et l’excellence désertées par un certain misérabilisme post soixante-huitard. Sortir de l’amateurisme de l’à-peu-près. Et tant pis pour ceux qui, en retard d’une guerre, confondent égalité des chances et nivellement par le bas. Si le monde périt faute de connaissance, alors il nous appartient de lui donner ce qui lui faut pour reprendre vie.
Cyril Brun, directeur de l’OSP
Mercredi, 13 Avril 2011, 20:49

lundi 18 avril 2011

Périclès… un modèle ?

Qualité indispensable pour un « bon politique »…
Dans les pires situations, les pires moments, savoir affronter la colère du peuple en gardant son calme !
Périclès stratège d’Athènes…
Ses talents d’orateur, la qualité de sa « langue » ont été portés jusqu’à nous.
Plutarque nous permet d’apprécier « l’impassibilité péricléenne »*
« Un jour, par exemple, un individu particulièrement vulgaire et grossier l’insulta et l’accabla d’outrages. Périclès le supporta en silence toute la journée, en pleine agora, en continuant à régler les affaires courantes. Le soir, il s’en alla tranquillement tandis que l’autre le suivait et lui lançait toutes les injures possibles. Avant d’entrer chez lui, comme il faisait déjà nuit, il ordonna à l’un de ses serviteurs de prendre une lampe pour raccompagner l’homme et le reconduire chez lui. »
Autre temps de « grands hommes » authentiques…
Mais n’oublions pas que la courtoisie des rois de France était légendaire…
Il est vrai que cette qualité et ce « bien se tenir » se sont fortement dégradés au sommet de l’Etat…
 
by Léon Areva, le 17 avril 2011
*in « Périclès, la démocratie athénienne à l’épreuve du grand homme » de Vincent Azoulay (Armand Colin)

cet homme familier d’Aristote

Deux indispensables « compagnes » de l’homme d’action !
Quel est cet homme familier d’Aristote ? Un homme « reconnu à son action juste, délibérée et non à son savoir théorique » ? Pour juger avec discernement et agir prudemment…
 
« Il compose avec les circonstances pour agir, se contente du meilleur possible et ne recherche pas un absolu illusoire. »
« Son jugement s’exercera dans la pratique » 
Prudence ?
«[…] l’homme prudent sait appliquer, après délibération, les principes universels aux situations particulières, sachant que la situation n’impose jamais rien d’elle-même. »
Sagacité ?
« La sagacité consistera alors à s’appuyer sur les contingences en faisant un juste usage des passions selon les circonstances et permettra du coup d’agir de façon adéquate… »
Aristote, encore et toujours Aristote, qui a tracé et analysé « les conditions de la détermination volontaire ».
Aristote qui a fait de la sagesse une « science » :
« […]qui connaît en vue de quelle fin les choses sont faites, fin qui est, dans chaque être son bien et du souverain Bien dans l’ensemble de la nature. »
Très « capétien » cet homme…
[A partir d’un petit billet de Sophie Peters…
A valoir chaque jour alors que pointe les agitations de 2012…]

POLITIQUE ET VERITE

Dans le second volume de son Jésus de Nazareth, Benoît XVI rappelle le dialogue entre Pilate et Jésus à son procès.
« Pilate Lui demande : "Qu’est-ce que la vérité ?" (Jean, 18, 38). C’est la question que pose aussi la théorie politique moderne : la politique peut-elle accepter la vérité comme une catégorie structurelle ? Ou la vérité, en tant qu’elle est impossible à atteindre, doit-elle être reléguée à la sphère subjective, et remplacée par le souci de construire la paix et la justice en usant des instruments qui sont disponibles au pouvoir ? » (191)
Quoique notre texte fondateur (NDT : la déclaration d’Indépendance américaine de 1776) parle de vérités « évidentes », elles sont rarement tenues pour telles. La vérité est présentée comme « imposant » une sorte de « dogme » à ceux qui sont libres de choisir ce qu’ils veulent. L’essence de l’homme est le « choix », non la raison et la nature. Dans les faits, les politiques modernes, y compris la nôtre, ne sont pas fondées sur la vérité, mais sur son déni ou son impossibilité.
La tolérance ne signifie plus le droit ou la nécessité d’une discussion pacifique entre opinions divergentes. Une intolérance positive vise à écarter la prétention à la vérité comme potentiellement « totalitaire ». La « démocratie » est fondée sur le scepticisme, non la vérité. La dignité humaine passe par l’autonomie de l’homme. Nous nous déterminons non seulement par rapport à la vie et à la mort mais aussi sur la validité des principes fondateurs eux-mêmes. Le relativisme sous toutes ses formes exclut la vérité.
Dans ce contexte, aucun conflit ne peut être tranché. Les participants à un débat ne peuvent pas se comprendre car ils utilisent des termes qui ne sont pas mutuellement compréhensibles. Pour ce faire, il faudrait admettre que nous vivions dans un même monde, objectif, et sur lequel nous sommes tous d’accord. Au lieu de cela, les conflits sont désormais tranchés par le pouvoir, chacun admettant que rien n’est vrai, et restant indifférent aux conséquences de nos actes. Le désir de vérité est une illusion. Son fantôme hante les politiques qui ont choisi de ne pas s’y référer.
La question posée par Benoît XVI est de savoir si la vérité peut être une « catégorie structurelle ? » Ce qui veut dire : est-ce que cela fait une différence dans le domaine public selon qu’une chose est vraie et qu’une autre est fausse ? Si nous faisons la différence, nous portons atteinte aux « droits » de ceux qui ont « tort ». Ce n’est pas seulement que ce qui faux entraîne des conséquences néfastes. Mais ces conséquences ne sauraient être retenues comme preuves de l’erreur. Nous les rejetons ou les ignorons. La « structure » de la démocratie ne le permet pas. Cela serait une violation des « droits » et de la « dignité » de ceux qui sont supposés être dans l’erreur.
Notre civilisation, suivant en cela Socrate, est fondée sur la règle que « il n’est jamais bien de mal agir ». A l’évidence, s’il n’y a pas de différence entre le bien et le mal, le précepte socratique, que l’on retrouve dans le Christianisme, n’a plus aucun sens.
« Qu’est-ce que la vérité ? » - la question de Pilate au Christ – est intelligente et prophétique. La vérité devrait être le principal sujet de réflexion de tout politicien. Pilate ne voit rien d’avéré dans les accusations portées contre le Christ. Se déjuger et dénier la vérité comme principe universel signifie que Pilate a compris qu’il devait justifier la contradiction entre ce qu’il connaît et ce qu’il fait. Ce « dénouement » est habituellement rendu possible par le recours à quelque « théorie » qui permet au politicien d’effacer ses marques.
Donc, si vous trouvez que l’homme est innocent, que vous faites volte-face et autorisez qu’il soit exécuté, vous vous en sortez en usant du principe vide de sens que nul ne peut atteindre la vérité. Si nul ne peut l’atteindre, nul ne peut être tenu par elle. Pilate est pourtant un gouverneur romain. L’homme comparaissait devant lui parce que les Romains avaient le pouvoir judiciaire de l’acquitter ou de le condamner. Les Romains étaient fiers de leur justice. Pilate n’a pas été sourd à son appel. Il n’a trouvé aucune « charge » contre lui.
A quoi ressemblerait une politique où la vérité serait une « catégorie structurelle » ? En premier, ce serait une politique qui appellerait les choses par leur nom. Le contraire de la vérité est le mensonge. Le pire de ce qui peut nous arriver, selon Platon, est que « notre âme recèle un mensonge sur les choses qui sont ». Platon savait que nous pouvions nous mentir à nous-mêmes pour atteindre ce que nous voulions.
Le second principe structurel est que la vérité n’est pas notre création. La vérité n’est pas la conformité de nos esprits à ce que nous voulons. Mais la conformité de nos esprits à ce qui est. Une partie de la pensée moderne nous enseigne que s’il y a quelque chose qui est, nous ne pouvons en être sûrs. Il n’y a en tout cas pas d’ordre qui supposerait une origine. Et il est encore plus certain que nous ne pouvons pas connaître qui nous sommes ou qui nous devons être à partir d’une réalité que nous n’avons pas nous-mêmes créée.
Or nous ne sommes pas la cause de notre propre création. La vérité sur ce que nous sommes, il nous revient de la découvrir, de la trouver, pas de la façonner. Notre fin n’est pas dans ce que nous choisissons pour nous-mêmes mais si nous choisissons celle qui est implicite dans notre être. En ce sens, la vérité et la politique vont de pair.
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Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2011/politics-and-truth.html
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James V. Schall, S.J., est professeur à l’université Georgetown
Merci pour cette traduction ... exprime Alain de Chantérac ...
Dostoïevski raisonnait aussi de façon implacable : "Si Dieu n’existe pas, tout est permis"
Du moins par la Loi, qui devient vite celle du plus fort, ou celle du plus grand nombre. Et il est plus facile de mentir pour convaincre le plus grand nombre, surtout quand cela lui plait.
" Aucune morale (NDR fut elle naturelle) ne saurait être au dessus de la Loi" disait Chirac. Loi changeante donc au grè des moeurs, dans laquelle la Justice perd son sens, quand elle ne défend plus le faible.
Sans vérité point de liberté, ni pour le menteur ni pour la victime

mercredi 13 avril 2011

Syndicat du Livre : au cœur de la forteresse

Dans un livre paru en septembre 2007 aux éditions Calmann-Lévy, Spéciale dernière, Emmanuel Schwartzenberg ivre le récit détaillé des tractations, manœuvres et abdications qui parsemèrent la vie mouvementée de la presse française depuis 1944 et entérinèrent progressivement la perte de souveraineté des éditeurs, la paupérisation des rédactions et la mystification comme méthode de communication de l'ensemble de la profession. Il est interrogé ici par Emmanuelle Duverger et Robert Ménard pour la revue Médias (www.revue-medias.com) :

– Le syndicat du Livre a-t-il encore un monopole à l’embauche ?

Oui, même si la loi française l’interdit. C’est une tolérance qui survit depuis 1944.

– C’est pourtant contraire à la Constitution, qui consacre le pluralisme syndical ?

La loi est une chose, son application en est une autre. On peut très bien sauvegarder une pratique illicite en oubliant de la sanctionner. Personne n’a jamais osé dénoncer cette illégalité. Les éditeurs pas plus que les autres syndicats, Force ouvrière, la CFDT ou Sud.

– Pourquoi ?
Parce que le syndicat du Livre était l’aristocratie de la CGT, son fer de lance, sa garde rapprochée, son bras armé et la branche dans laquelle il pouvait avoir le plus confiance. Attaquer ce sanctuaire, c’était entrer en conflit ouvert avec le Parti communiste et la CGT. Comme tout est rapport d’équilibre, les autres syndicats n’avaient pas intérêt à affronter la CGT avec laquelle ils étaient amenés à collaborer. De leur côté, les éditeurs, qui sont dépendants de ce syndicat, n’allaient pas partir en guerre. Le seul à l’avoir tenté, c’est Émilien Amaury en 1975. Mal lui en a pris : de 750 000 exemplaires vendus, Le Parisien est tombé à 350 000 ventes un an et demi après le conflit. Il voulait licencier quelques centaines d’ouvriers du Livre. Après sa mort, le groupe est parvenu à un accord qui prévoyait de reclasser tous les ouvriers licenciés du Parisien au sein des Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne (NMPP). Le Livre a remporté une énorme bataille puisqu’il a conservé son influence et ses emplois, payés par tous les autres éditeurs. Après cela, l’idée même de bataille a été abandonnée.

– Le syndicat du Livre a encore un pouvoir assez fort pour faire peur aux patrons de presse ?
Le pré-presse – ceux qui travaillaient dans la composition, la photogravure, la mise en forme des articles – a disparu. On les retrouve désormais au sein des rédactions. Au Monde, des ouvriers du Livre travaillent au service photo. Au Figaro, ils sont secrétaires de rédaction, comme aux Échos. Et les rotativistes sont toujours là. Sur une rotative, vous avez des boutons rouges. Il suffit d’appuyer sur l’un d’eux et tout s’arrête. Vous pouvez également faire tomber un crayon dans la rotative, lorsqu’elle tourne, et la plaque d’impression sera déchiquetée. Les moyens de ralentir l’impression d’un journal sont nombreux. (…)

– Votre livre ne serait pas sorti il y a vingt ans ?
Même cinq ans.

– Dangereux ?
Oui, pour moi et pour les gens qui m’auraient parlé.

– Vous avez eu des réactions négatives ?
Des réactions inquiètes de la part de certains éditeurs qui voudraient bien voir les révélations de ce livre appartenir au passé. En revanche, certains syndicalistes du Livre, sans le voir d’un bon œil, ne s’en alarment pas trop parce qu’ils se sentent suffisamment forts pour continuer de revendiquer des avantages, des salaires aussi importants.

– Ils gagnent combien ?
Un ouvrier du Livre gagne la même chose au début de sa carrière à 20 ans que lorsqu’il part à 50 ans : 4 500 euros. Le cadre, lui, gagne 6 500 euros. Certains accords d’entreprises vont même au-delà. Le Figaro, Le Monde, Le Parisien accordent des salaires plus élevés pour préserver la paix sociale. En outre, les salariés n’occupent jamais longtemps le même poste. Un jour, sur une rotative, le lendemain, à l’expédition des journaux, et le troisième jour, affecté à une autre tâche technique : on ne peut jamais le suivre et il ne sera jamais sanctionné. C’est un système très performant.

– Vous dites que les ouvriers du Livre ont été reclassés dans les rédactions. Les journalistes qui débutent ne gagnent évidemment pas ces sommes-là : c’est accepté par tout le monde ?
Les journalistes n’ont pas le choix. Ils devraient mieux défendre leurs intérêts, mais paradoxalement, certains comptent sur les ouvriers du Livre pour cela. Par exemple, le rédacteur en chef technique de Libération est un ancien ouvrier du Livre. Il est entré en même temps que Joffrin.

– Les mœurs du syndicat pourraient donc se retrouver dans les rédactions ?
Oui, parce qu’ils sont plus efficaces que les journalistes quand il s’agit de défendre leur cause. (…)

– Il n’y a jamais eu de tentative politique pour trouver une solution à cette question du syndicat du Livre ?
En 1983, Martine Aubry, alors ministre du Travail, a rencontré Jean Miot et Robert Hersant et leur a proposé de mettre fin au syndicat du Livre. Ils ont catégoriquement refusé. Quand Robert Hersant est mort, Alain Juppé a organisé un déjeuner avec Maurice Gourdault-Montagne, son directeur de cabinet, et Yves de Chaisemartin, président de la Socpress et du Figaro. Il leur a proposé de créer un fonds de modernisation qui aurait signifié la mort du syndicat du Livre. Chaisemartin, comme Hersant précédemment, a répondu : “Je n’ai pas besoin d’argent, mais de tanks.” En réalité, ils ont refusé ce scénario pour plusieurs raisons. Tout d’abord, aucun de ces dirigeants d’entreprise, à l’exception peut-être de Robert Hersant, n’avait un pouvoir financier suffisant pour faire face à un conflit de longue durée, à la différence d’un Rupert Murdoch. Surtout, ils ne savaient pas si, au bout du compte, ils n’en feraient pas les frais. Quand vous êtes propriétaire, comme l’était Amaury, ou Bolloré aujourd’hui, vous pouvez initier le conflit, personne ne vous mettra dehors. Mais si vous êtes employé ou avec un actionnariat éclaté, comment prendre un tel risque ? Et puis, certains y ont vu un allié contre toute concurrence. Les tarifs élevés du syndicat du Livre bloquent, en effet, le marché. Depuis 1974, date de création de Libération, il n’y a pas eu un seul quotidien national qui ait réussi à s’implanter en France. Regardez le Bild. Il a finalement renoncé à se lancer. Les Espagnols aussi étaient tentés de s’installer. Mais le système français est totalement verrouillé, et les éditeurs finalement en profitent. (…)

– La CGT du Livre aura simplement permis à la France de garder des capitalistes français à la tête des journaux français ?
Elle aura abouti à l’éviction des éditeurs traditionnels, à l’exception du groupe Amaury, et à l’arrivée des industriels - qui ont des moyens illimités mais qui se désintéresseront de la presse dès qu’elle ne constituera plus un enjeu de pouvoir.

– Pourquoi cette lâcheté des politiques, en dehors de Juppé et Aubry ?
Une presse financièrement fragile est plus facile à mettre sous tutelle. Se sentant coupables de maintenir ce syndicat en place, ils subventionnent les imprimeries pour obtenir une forme de clémence des quotidiens à leur égard.

– Quel est le coût pour le contribuable ?
Le coût total d’un licenciement avait été estimé à 90 000 euros, charges sociales comprises. En réalité, il coûte 368 000 euros pour un ouvrier et 608 000 euros pour un cadre. Comme l’État en prend à sa charge 46 %, faites le calcul. Si Nicolas Sarkozy veut supprimer les régimes spéciaux, il lui faudra aussi s’attaquer à l’édition (…)
– C’est un syndicat riche ?
Oui. Le comité d’entreprise des NMPP que contrôle le syndicat du Livre touche 2,5 % du chiffre d’affaires de l’entreprise, quand, partout ailleurs, la règle est de 1 %. De plus, ils font leur petit commerce avec les plaques d’imprimerie... Ils ont des caisses de solidarité importantes et aujourd’hui, ils pourraient tenir le coup longtemps. Ils ont aussi une notion de leur intérêt collectif bien compris. Tous ces avantages doivent profiter au syndicat et si l’un d’entre eux décidait de récupérer un de ces avantages à son profit personnel, les sanctions seraient terribles. On l’a déjà vu.

– Il existe des dissensions au sein du syndicat ?
De plus en plus. Pour des questions de personnes et des questions idéologiques, dues en partie à la baisse d’influence de la CGT et à celle du Parti communiste. Malgré cela, la CGT a élaboré une stratégie qui finira bien par voir le jour, à l’instigation de Bernard Thibault : il s’agit de créer un grand syndicat de la communication, un “super syndicat du Livre” qui s’occuperait de toutes les activités des salariés employés dans les médias. S’ils réussissent, cela leur donnera une force de frappe bien plus importante. Il est plus facile de défendre une branche si vous mettez tout le monde en grève. Aujourd’hui, si seuls les quotidiens se mettent en grève, ça touche moins l’économie que si vous n’avez plus de télé ou de radio. C’est à cela qu’ils travaillent. (…)
 

Presse écrite : mettre un nom sur “l'exception française”

Aviez-vous lu lors de l’ouverture des “Etats généraux de la presse écrite” à l’Elysée qui nous valut à ce moment une avalanche de commentaires affligés sur la situation des grands quotidiens français, menacés de disparition pure et simple face à la concurrence de l’audiovisuel, d’internet et des journaux gratuits.
Alors que toute la presse écrite, dans les autres pays du monde, résiste aux mêmes pressions de l’environnement, sans menace pour sa propre survie. Pourquoi la France fait-elle exception ?

La réponse passe d’abord par l’histoire de la Libération : en 1944, le Gouvernement Provisoire concède le monopole d’embauche pour la composition typographique et la fabrication des quotidiens au “Syndicat du Livre” de la CGT. Trois ans plus tard, en 1947, un autre monopole est établi, toujours au profit des courroies de transmission du Parti Communiste, sur la distribution des journaux : celui des NMPP (Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne). Aujourd’hui encore, ces deux brontosaures peuvent bloquer sans préavis la fabrication et la distribution des journaux dans tous les points de vente du territoire national.

Le Mur de Berlin est tombé depuis bientôt dix-huit ans, mais les militants de la CGT règnent encore en maîtres absolus sur les procédés de fabrication, le volume des effectifs, le temps de travail et le montant des salaires dans les imprimeries de nos quotidiens, où un rotativiste bénéficie d’un revenu net trois fois supérieur à celui du marché. Il en résulte que les coûts d’impression et de diffusion des quotidiens nationaux, en France, s’établissent à plus du double de celui des autres pays européens !

Comme il est impossible d’en faire supporter le poids au lecteur (ni d’en révéler le scandale), les patrons de la presse française ont fini par trouver normal de vendre leurs journaux très au-dessous de leur prix de revient en exploitant les ressources des recettes publicitaires: 50 à 80% de leur chiffre d’affaires dépend désormais des annonceurs, qui peuvent décider du jour au lendemain de faire évoluer les “plans médias” en reportant sur d’autres supports l’essentiel de leurs investissements.

Sous la crise “économique” de la presse, le principal problème est donc bien celui d’un monopole anachronique, liberticide et ruineux. Le paradoxe serait bien que cette question proprement politique soit la seule que les “Etats généraux de la presse écrite” convoqués par le Président de la République ne s’attachent pas à régler. Le long discours inaugural de Nicolas Sarkozy, le 2 octobre, y fait deux allusions si discrètes et si contradictoires qu'elles auraient plutôt tendance à inviter tout le monde à faire prudemment l'impasse du sujet.
©Emmanuel Barbier/Sedcontra, octobre 2008

mardi 12 avril 2011

Humanisme, dites-vous ?

L’époque se gargarise de mots et l’humanisme est une vedette. On le trouve partout, en politique, en économie, en gestion et, par respect pour la laïcité, le voilà en passe de devenir le dénominateur commun des religions. On s’entend d’autant plus facilement sur le mot, que chacun peut lui donner le sens qui lui convient. Si on retient la définition du dictionnaire, il s’agit « de toute théorie ou doctrine qui prend pour fin la personne et son épanouissement ». Encore faut-il savoir ce qu’est cette personne, car le mot est aussi équivoque. En référence à l’étymologie, disons que c’est un individu qui joue un rôle, qui remplit une fonction. Mais alors quel rôle ou quelle fonction ?
Il semble que la bible, aux premiers chapitres de la Genèse (1,26 et 2,4b) puisse nous servir de guide. Fruit d’une antique sagesse, elle présente deux récits complémentaires de la création de l’homme. Dans le premier, l’homme apparaît le sixième jour, couronnant en quelque sorte l’œuvre de Dieu. C’est de celui-ci qu’il reçoit sa mission : « emplissez la terre et soumettez-la ». Dans le second récit, c’est l’homme qui entre en scène le premier. Le jardin d’Eden lui est offert, avec toutes ses ressources, mais un arbre lui est interdit, celui de la connaissance du bien et du mal. Comprenons qu’il peut user de tout mais ne peut prétendre se faire l’arbitre du bien et du mal. Bref que dans ce domaine, il lui faut une référence extérieure à lui. Mais, pour le reste, le voilà en charge de résoudre, pour lui-même, le problème de la liberté, c’est-à-dire du choix. 
Poursuivre l’œuvre de Dieu d’une part, choisir ce qui peut la compléter, d’autre part : c’est dans cette double mission que va s’accomplir sa personne. C’est donc cette double mission que prend en charge un véritable humanisme.
Pour la première, si ce n’est pas facile, c’est clair : il s’agit de poursuivre l’œuvre du créateur dans le monde qui nous est donné, en l’humanisant. On veut dire en l’organisant pour que, dans tous les domaines, s’améliorent les conditions de vie de l’homme On pense à l’immense effort accompli, à travers les siècles, pour faciliter les échanges, pour développer l’agriculture, éliminer ou du moins faciliter les tâches les plus pénibles, faire reculer les maladies. Ebloui par ses conquêtes, il est tentant pour l’homme de ne pas voir de limite à son pouvoir et d’oublier le conflit qu’il est appelé à régler avec une nature dont il n’est pas le maître et qui sait le lui rappeler.
Dans la seconde mission, ce n’est plus l’humanisation du monde qui définit l’humanisme, c’est ce qu’on peut appeler l’hominisation de l’homme. Le combat est intérieur : il est moral. Comment vivre une liberté responsable sans se laisser prendre au mirage de l’indépendance ? Chacun comprendra que l’effort devra porter sur une véritable conquête du discernement qui ne peut être que le fruit de la culture. Toutes les potentialités de la personne sont alors mobilisées. Les anciens distinguaient la psyche, le logos et le pneuma. On entre en culture par l’un ou l’autre des deux premiers, la sensibilité ou la raison, c’est-à-dire l’art ou la science. Le tout est d’aller jusqu’au bout de ses talents. Alors s’ouvrent les horizons de la vie spirituelle qui dépasse intelligence et sensibilité par une sorte de fascination de la beauté ou de la vérité.
Promouvoir l’humanisme, c’est donc, on le voit, mettre en œuvre l’ensemble des conditions favorables à l’efficacité et à l’épanouissement de chacun. Il trouve d’ailleurs l’une dans l’autre et réciproquement. En effet tout en humanisant le monde, l’homme se construit et en se construisant il se rend plus efficace encore. L’humanisme est la conscience de cette double responsabilité. Que la Bible nous l’apprenne, ou nous le rappelle, est le signe que nous n’inventons pas l’humanisme et que nous avons besoin de chercher, ailleurs qu’en nous-mêmes ce qui peut guider nos pas.
[in France catholique, mardi 12 avril 2011, Hyacinthe-Marie Houard]